Aujourd’hui je vous propose un billet consacré à l’art de la micrographie dans les manuscrits hébreux.
La micrographie ou microcalligraphie, née au haut Moyen Age, est l’une des formes d’expression de l’art juif présente dans les manuscrits hébreux. L’écriture hébraïque ayant une esthétique indéniable, les copistes juifs ont très tôt eu l’idée d’utiliser les lettres dans une volonté décorative.
La micrographie est une écriture minuscule qui prend la forme de motifs géométriques, de formes végétales, zoomorphes, anthropomorphes, et qui peuvent parfois illustrer le texte biblique. Elle sert notamment à mettre dans les pages des bibles des annotations et gloses (c’est à dire la massore : le commentaire critique du texte sur la lecture, l’orthographe, la graphie). D’origine proche-orientale, elle s’est diffusée jusqu’à la péninsule ibérique puis dans le Saint Empire, le Nord de la France et au Yémen. Il s’agit donc d’une forme originale provenant des bibles hébraïques médiévales qui s’est ensuite épanouie tout particulièrement dans le Livre des Psaumes et dans les Proverbes.
Les copistes juifs ont suivi les tendances artistiques des époques et des territoires. Par exemple, en terre d’Islam et en Espagne, on retrouve la micrographie sous des formes géométriques, architecturales, végétales, alors que les motifs prennent des formes figuratives et symboliques dans les territoires germaniques et français. Sur ces mêmes terres (ashkénazes), ils ont même parfois pris la forme de créatures fabuleuses. Plus tard, à partir du 17e siècle, on retrouve la micrographie dans les contrats de mariage, sur des amulettes ou encore dans le livre d’Esther et autres textes écrits en hébreux.
Je vous propose maintenant s’attarder sur quelques exemples :
1 et 2) Tanakh : « Duke of Sussex Bible », 1350-1374 (British Library)
La micrographie est ici le seul élément décoratif du texte. Elle prend la forme de décors géométriques et abstraits. Cette bible hébraïque fut copiée en Catalogne au 14e siècle. Elle a appartenu par la suite à un talmudiste de Salonique, avant d’entrer dans la collection du Duc de Sussex au 18e siècle.
3, 4 et 5) The Yonah Pentateuch, 14e s, Germanie (British Library)
Originaire du monde ashkénaze, ce codex du 14e siècle contient la Torah, des éléments de littérature prophétique et les Cinq Rouleaux (Meguiloth). La micrographie contenue dans ce codex prend des formes figuratives, ce qui la rend particulièrement originale.
6, 7, et 8) The Sana’a Pentateuch, 1469 (British Library)
Ce codex célèbre pour la beauté de ses pages-tapis aux représentations stylisées de montagnes et poissons nageant dans la mer offre également un bel exemple de l’art de la micrographie. Le texte utilisé pour la micrographie provient du Livre des Psaumes, en écriture de style yéménite.
Bonne découverte !